
Pourquoi ne nous rend-on jamais les livres qu’on prête ?
On a tous en a fait (l’amère) expérience : prêter un livre, c’est souvent ne jamais le revoir… Ce phénomène, universel et intemporel, a traversé les siècles et touche toutes les catégories de lecteurs. Pourquoi certains ouvrages disparaissent-ils ainsi dans les limbes des bibliothèques emprunteuses ? Décryptage d’un mystère littéraire.
Lorsqu’on prête un livre, on partage bien plus qu’un objet : on transmet une histoire, une émotion, parfois même un véritable fragment de soi. Pour l’emprunteur, ce prêt peut vite prendre une tournure insidieuse : il lit, s’attache, puis va oublier peu à peu qu’il ne s’agit pas de son propre exemplaire. La psychologie cognitive a même un terme pour cela : « l’effet de dotation ». Il décrit notre tendance à accorder plus de valeur aux objets une fois qu’ils sont en notre possession. Le livre devient un compagnon de chevet, prend place sur une étagère, et avec le temps, son statut de « prêté » s’efface au profit d’un sentiment d’appropriation. Un autre facteur majeur est tout simplement l’oubli. À force de voir l’objet au quotidien, l’emprunteur intègre le livre à son environnement personnel. Plus le temps passe, plus le souvenir du propriétaire originel s’estompe. Parfois, l’oubli est plus ou moins conscient : certains emprunteurs développent une forme de dissonance cognitive, justifiant leur non-restitution par des excuses bien rodées : « Il ne m’a jamais réclamé ce livre, donc il n’y tient pas tant que ça. » ou encore « De toute façon, il ne le relira sûrement pas ».
La symbolique du livre : plus qu’un simple objet
Un livre n’est pas un bien comme un autre. Il véhicule une charge émotionnelle et intellectuelle forte. Recevoir un livre en prêt, c’est aussi recevoir une recommandation implicite, une invitation à découvrir un univers. Cette transmission peut inconsciemment créer un lien sentimental chez l’emprunteur qui, parfois, n’arrive plus à s’en séparer. Dans certaines cultures, prêter un livre revient même à une forme de donation implicite. Un dicton populaire italien affirme : « Libro prestato, libro spacciato » (Livre prêté, livre perdu). Certains lecteurs préfèrent ainsi considérer le prêt comme un don déguisé… Ils ont souvent développé une forme de rationalisation : pour eux, un livre est fait pour circuler et être lu, et non pour rester figé sur une étagère.
Comment récupérer un livre sans tensions ?
Face à ce phénomène universel, certaines stratégies permettent de maximiser les chances de revoir un livre prêté :
- Noter l’emprunt dans un carnet (ou une application dédiée).
- Glisser un marque-page personnalisé (avec un rappel subtil du propriétaire !)
- Demander des nouvelles du livre avec intérêt, sans exiger son retour immédiatement.
- Privilégier les prêts de livres auxquels on tient peu… et les envisager comme de possibles donations !
En fin de compte, la meilleure stratégie reste encore d’adopter la sagesse populaire : ne jamais prêter un livre que l’on n’est pas prêt à perdre. La littérature est faite pour être partagée, mais certains trésors de bibliothèque méritent de rester entre des mains sûres.
Alors, avant de prêter votre prochain roman préféré, demandez-vous : « seriez-vous prêt à ne plus jamais le revoir ? » Et méditez sur ce proverbe italien : « Celui qui prête un livre est un naïf, celui qui le rend est un idiot » !
2 commentaires sur “Pourquoi ne nous rend-on jamais les livres qu’on prête ?”
Une jolie idée que celle-ci !! Des liens qui perdurent grâce à la lecture !! J’y penserais !
« Transmettre notre belle langue, même « jeune » de
3 siecles » (Molière ) et cela passe aussi par la lecture !
J’ai bcp de mal à prêter les livres que j’aime,,,,pour les autres, je les donne ….les échange,..parfois je les vends.
Bonne journée..à tous les lecteurs et lectrices !!
Je prête souvent et facilement des livres. Comme je ne sais plus à qui, je rachètent sur recyclivre ceux qui me sont chers, ce qui fait que lorsqu’on m’en rend, je me retrouve avec deux voire trois exemplaires, prêts à repartir.
J’ai des amis qui habitent loin. Lorsque nous discutons de livres ou si une amie est un peu triste, miracle avec recyclivre, je fais livrer un ou plusieurs livres directement chez eux dont nous pourrons parler plus tard.